Un hiver en France. Premier volet : Paris
Fuir le froid polaire et les chaussées glissantes – destination France
Cet été, je vous propose un parcours hivernal en France. Il commence à Paris et se termine à Biarritz en passant par Colmar, Grenoble et Montpellier.
Passer l’hiver en France – à priori une bonne idée. On échappera au froid et aux dangers des trottoirs glissants mais attention, le froid peut vous guetter à l’intérieur des appartements. Il convient donc de s’assurer que le chauffage fonctionne bien et que votre logement parisien est bien isolé. Malgré tout, une paire de grosses chaussettes en laine sera de mise.
Pour commencer mon long séjour en janvier 2024, j’ai eu la chance de louer un appartement dans le 5ème arrondissement de Paris, non loin de la célèbre rue Mouffetard. Je dis une chance car de nombreux quartiers étaient en travaux en raison des jeux olympiques de cet été (2024). Bien chauffé et idéalement situé, cet agréable appartement m’a permis de rester à l’intérieur autant que je le souhaitais sans grelotter de froid. J’en ai profité pour lire, pour bien manger et sortir.
Connaissant le quartier, j’y possède mes repères : la librairie Les traversées, l’irrésistible Carl Marletti réputée pour être la meilleure pâtisserie de Paris et la Brûlerie des Gobelins pour le café et le thé, sans parler de la rue Mouffetard où l’on trouve de tout.
Je commence par la librairie et me procure le livre de l’année 2023, Triste tigre de Neige Sinno. Celui qui a raté de peu le dernier prix Goncourt et l’a perdu au bout de 14 tours de vote contre Veiller sur elle de Jean-Baptiste Andréa. Il a cependant obtenu le prix Femina et le prix Goncourt des lycéens 2023. Ce livre bouleversant et singulier, d’une belle écriture sur un sujet terrible qu’est l’inceste m’habite encore. Il ne s’agit pas d’une énième histoire d’inceste, il s’agit d’un magnifique texte sur un sujet impossible qui raconte crument, avec précision des faits à la limite du supportable.
Ensuite, un ami me prête une énorme biographie de Gustave Flaubert (1821–1880) qui me passionne. Je me rends compte qu’en réalité, je ne savais rien de lui. Considérant Madame Bovary comme un chef d’œuvre, j’avais imaginé que Flaubert l’avait écrit vers la fin de sa vie. Pas du tout ! J’ai donc appris que Madame Bovary est son premier roman et lui apporte d’emblée une grande notoriété dans le milieu littéraire de l’époque auprès d’autres grands comme Émile Zola, Victor Hugo, Guy de Maupassant, George Sand. J’ai appris qu’en 1857, à la suite de la publication de Madame Bovary, il échappe de justesse à une condamnation car accusé « d’outrage aux bonnes mœurs et à la religion » alors que la même année, Arthur Rimbaud est condamné pour cette même raison.
J’ai notamment appris que malgré l’amitié qu’il vouait aux frères Goncourt, ces derniers ne lui faisaient pas de cadeau, le critiquant jusqu’à son comportement en société, ses habitudes vestimentaires et son apparence physique. En somme, des critiques plutôt naïves, méchantes et mesquines. Cela m’a d’ailleurs légèrement refroidie quant à l’estime pour ces frères dont le nom reste gravé dans nos esprits davantage pour le prix dont ils sont à l’origine que pour leurs propres écrits de l’époque.
J’ai appris que Flaubert hurlait ses textes ayant besoin de les entendre. Il les peaufinait à l’infini. J’ai appris qu’il souffrait d’épilepsie et qu’il avait, vers la fin de sa vie, de gros soucis financiers. J’ai appris qu’il avait séjourné plusieurs fois à Nohant chez George Sand avec qui il entretenait une belle relation d’amitié et d’estime réciproque. Et d’ailleurs, ayant à peine fermé ce gros volume de près de mille pages que j’avais déjà envie de partir à la recherche de sa correspondance avec George Sand…
Un séjour parisien à la fois gastronomique et littéraire, en somme très culturel comme d’habitude mais cette fois je me suis véritablement fait plaisir : je suis allée voir l’opéra rock dont je rêvais depuis ma jeunesse et le début des années 1980, dont j’écoutais la musique depuis des décennies et que je n’ai cessé de chanter avec mes petits-enfants. J’ai vu, entendu et apprécié avec beaucoup d’émotion Starmania de Michel Berger et Luc Plamondon qui vit une renaissance dans une version revisitée. Magnifique, un moment de grand bonheur ! J’ai adoré !
La prochaine fois Colmar en Alsace.
A bientôt !
Kristina Haataja, écrivaine et traductrice littéraire